Innovation



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  • 1 Définition

    L’innovation est un changement qui, dans le but d’améliorer une situation, peut porter sur une pratique, une méthode, une façon d’enseigner certains contenus disciplinaires, une procédure, un outil ou de nouvelles clientèles, etc. Cette amélioration peut toucher un produit, un processus (en le rendant plus productif ou plus facile), elle peut également permettre d’atteindre de nouveaux objectifs ou objets qui n’auraient pu être abordés sans un changement de la situation (Peraya & Jaccaz, 2004).

    La théorie de la diffusion de l’innovationinnovation diffusion theory, proposée par Rogers offre un cadre conceptuel au concept d’acceptabilité et tente d’expliquer l’évolution d’une innovation technologique du stade d’invention à celle d’une utilisation étendue. Cinq éléments détermineraient l’adoption ou la diffusion d’une nouvelle technologie (Rogers, 1995) :

    • l’avantage relatif est le degré auquel une innovation est perçue comme étant meilleure que celles qui existent déjà. Il n’est pas nécessaire que cette innovation possède beaucoup plus d’avantages que les autres mais ce qui est important, c’est que l’individu la perçoive comme étant avantageuse.
    • la compatibilité est une mesure du degré auquel une innovation est perçue comme étant consistante avec les valeurs existantes, les expériences passées, les pratiques sociales et normes des utilisateurs. Une idée incompatible avec ces valeurs et normes est moins vite adoptée qu’une innovation compatible. De même, dans certains cas, l’adoption d’une innovation incompatible nécessitant l’adoption au préalable d’un nouveau système de valeur prend de ce fait un temps considérable.
    • la complexité est une mesure du degré auquel une innovation est perçue comme étant difficile à comprendre et à utiliser. Les nouvelles idées simples à comprendre sont adoptées beaucoup plus rapidement que d’autres qui nécessitent de développer de nouvelles compétences avant de pouvoir les comprendre.
    • la testabilité consiste en la possibilité de tester une innovation et de la modifier avant de s’engager à l’utiliser. L’opportunité de tester une innovation va permettre aux utilisateurs d’avoir davantage confiance en le produit car ils auront eu la possibilité d’apprendre à l’utiliser.
    • l’observabilité est le degré auquel les résultats et bénéfices d’une innovation sont clairs. Plus les résultats de l’adoption de l’innovation sont clairs et plus les individus l’adoptent facilement.

    Il existe également un modèle de la résistance à l’innovation proposé par Ram (1987). La théorie de de la résistance à l’innovation de Ram propose de s’intéresser aux processus de résistance à l’innovation comme réaction et réponse normale de la part des usagers confrontés au changement. Dans cette approche, la résistance à l’innovation est déclenchée à partir du moment où la personne perçoit le produit comme une nouveauté et donc comme un changement potentiel. La résistance à l’innovation est donc également résistance au changement, cette dernière se caractérisant non pas par un rejet de la technique ou de l’objet lui-même mais par la crainte d’altérer un équilibre, des routines, un statu quo.

    Plus le degré de changement engendré par l’innovation et perçu par la personne est important, plus la résistance sera forte. Pour l’auteur, la caractéristique essentielle pour qu’une innovation soit une réussite réside dans sa capacité à évoluer selon les résistances et les besoins des personnes. Si l’innovation ne peut être modifiée, la résistance ne pourra être surmontée (Ram, 1987).

    Le modèle de la résistance à l’innovation peut ainsi être associé judicieusement à la théorie de la diffusion lorsqu’il s’agit de s’intéresser non pas à la diffusion d’une innovation mais à son absence de diffusion auprès d’une certaine catégorie de population.

    2 Application

    L’acceptabilité de l’innovation dans le cadre des technologies renvoie au modèle de l’acceptation de la technologieTechnology Acceptance Model (Davis, 1986). Ce modèle prédit l’acceptabilité d’un outil et identifie les modifications devant être apportées au système afin de le rendre acceptable aux utilisateurs. Deux facteurs déterminent l’acceptabilité d’un système d’information : la perception de l’utilité et la perception de la facilité d’utilisation. La perception de l’utilité définit le degré auquel une personne pense que l’utilisation d’un système est susceptible d’améliorer ses performances. La perception de la facilité d’utilisation se réfère au degré d’efforts limités qu’une personne pense de l’utilisation d’un système.

    Même si une personne n’apprécie pas un système, il a de grandes chances de l’utiliser s’il le perçoit comme améliorant ses performances au travail. En effet, l’attitude générale d’une personne face à un système ne serait pas le seul élément qui détermine son utilisation (Davis, 1986). De plus, la perception de l’utilité et la perception de la facilité d’utilisation seraient directement liés.

    Les modèles représentés par les pairs ou les experts (les formateurs universitaires, par exemple) sont susceptibles d’influencer l’innovation pédagogique. Les pratiques futures des enseignants est fortement influencée par effet de modelage. Lorsque les enseignants en formation sont exposés à des pratiques d’intégration des TIC peu innovantes, ils ont tendance à reproduire ces mêmes pratiques dans leur future profession (Karsenti, 2004).

    Berman et McLaughlin (1976) définissent 4 niveaux différents d’implantation de l’innovation :

    • L’implantation symbolique décrit un état où l’implantation n’a pas lieu. Le projet d’innovation suscite l’indifférence générale : le matériel didactique est présent, disponible. Sa présence n’inspire toutefois aucun intérêt d’appropriation.
    • La cooptation désigne un niveau d’implantation où le projet d’innovation est intégré partiellement dans l’environnement scolaire, c’est-à-dire que l’enseignant en fait usage. Son utilisation n’implique toutefois aucune modification au niveau des comportements et des attitudes des individus. Il s’agit alors davantage d’un changement par substitution alors qu’un produit en remplace un autre, sans que la pratique comme telle ne soit affectée.
    • L’apprentissage technologique consiste en un stade d’implantation où les enseignants établissent un lien de dépendance avec le projet d’innovation, c’est-à-dire que les procédures prévues par le nouveau matériel à implanter sont respectées à la lettre, sans modifications aucune de la part des enseignants. Des adaptations à la pratique sont toutefois effectuées par les personnes afin d’intégrer convenablement le changement à la pratique.
    • Le dernier niveau, l’adaptation mutuelle, désigne selon Berman et McLaughlin (1976) le véritable stade d’implantation alors que la pratique se transforme pour intégrer un nouvel élément qui a aussi subi des modifications afin d’être cohérent avec les façons de faire déjà bien ancrées chez l’enseignant. Il s’agit donc d’une implantation d’un changement qui est réfléchie, critique et qui tient compte de la pratique actuelle de la personne impliquée. Il sera donc intéressant de vérifier à quel type d’implantations ces nouveaux enseignants parviennent lorsqu’il est question de l’intégration des TIC, tant dans la pratique actuelle (stages) que dans la pratique future.

    Karsenti (2001) et Karsenti, Savoie-Zajc et Larose (2001) reprennent ces niveaux d’implantation d’une innovation dans leurs travaux avec les enseignants en formation initiale.

    Philippe Mallein (2002), dans ses travaux, analyse les facteurs clés déclenchant l’usage d’une innovation. Selon Mallein, pour qu’une personne adopte un objet il serait alors nécessaire :

    • qu’il ait du sens pour elle, que son utilisation soit perçue comme positive
    • qu’il lui soit utile dans ses activités quotidiennes
    • qu’il soit facilement utilisable et que son usage soit simple à comprendre
    • qu’il présente une valeur ajoutée économique réelle

    3 Territorialité 

    Palas et Palpacuer (2008:résumé) discutent «une idée aujourd’hui bien répandue, tant dans les recherches scientifiques que dans les mesures de politique industrielle destinées à promouvoir la compétitivité des territoires. Celle-ci postule la nature systématiquement « territorialisée » des réseaux d’innovation et envisage la co-localisation des acteurs comme une condition déterminante de leur performance.» Un étude des conditions de formation et de désagrégation de l’Alliance aux alentours de Grenoble permet aux auteurs de remettre en question la pertinence des modèles théoriques existants, quant aux rôles dévolus à la proximité géographique et à l’ancrage territorial dans le processus d’innovation. Leurs «résultats attestent l’apparition d’une forme alternative d’organisation du processus d’innovation, moins sensible à la proximité spatiale des acteurs et où l’ancrage territorial devient un processus temporaire et réversible.» (Résumé)

    On entend des idées similaires en ce qui concernent les établissement pédagogiques (donc la territorialité de l’école ou encore d’une région). On constate également l’émergence de communautés épistémiques non-territorialisées. A poursuivre ….

    4 Références

    Davis, F.D. (1986). A technology acceptance model for empirically testing new end-user information systems: theory and results. PhD dissertation, MIT Sloan School of Management, Cambridge, MA.

    Karsenti, T., Savoie-Zajc, L. et Larose, F. (2001). Les futurs enseignants confrontés aux TIC : Changements dans l’attitude, la motivation et les pratiques pédagogiques. Éducation et Francophonie, 29 (1). Document électronique accessible par Internet : http://www.acelf.ca/c/revue/revuehtml/29-1/03-Karsenti.html

    Karsenti, T. (2004). Les TIC et les futurs enseignants : les facteurs qui influencent leur utilisation (pp. 3-16). In D. Biron et M. Cividini (dir.), La formation enseignante au temps des réformes. (pp. 3-16). Sherbrooke : Éditions du CRP.

    Mallein Ph. (sous la direction de Privat G.) (2002). Ces objets qui communiquent. Paris : Lavoisier. Numéro spécial de Les cahiers du numérique, vol. 3, n° 4.

    Mallein, Ph. et Toussaint, Y. (1994). L’intégration sociale des TIC: une sociologie des usages, Technologie de l’information et société, 6 (4): 315-335.

    Nicolas Balas et Florence Palpacuer « Les réseaux d’innovation sont-ils toujours ancrés dans les territoires ? », Entreprises et histoire 4/2008 (n° 53), p. 12-33. URL : www.cairn.info/revue-entreprises-et-histoire-2008-4-page-12.htm. DOI : 10.3917/eh.053.0012.

    Peraya, D. et B. Jaccaz (2004). Analyser, Soutenir, et Piloter l’innovation: un modèle  » ASPI « . Colloque TICE 2004, Technologies de l’information et de la connaissance dans l’enseignement supérieur et l’industrie. Université de technologie. Compiègne (19 au 21 octobre).

    Ram, S. (1987). A model of innovation resistance. In Advances in Consumer Research, 14 (pp. 208-212).

    Rogers, E. (1995). Diffusion of innovation. Free Press, New York, 4th edition.

     


    Ajouté par MBA (21), le 5/10/17, avec l'aimable autorisation d'Edutechwiki

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