L’article présente les GRETA [1]. Il existe une direction de tutelle (le ministère de l’Éducation nationale), une politique partagée de développement et de services, une organisation des personnels identiques, des règles et des normes partagées.
Un organisme de formation (ou dispensateur de formation), parfois appelé prestataire de formation est une personne physique ou morale qui réalise des prestations de formation professionnelle continue. L’organisme doit déposer auprès du Préfet de région une déclaration d’activité dès la conclusion d’une première convention de formation professionnelle continue ou d’un premier contrat de formation professionnelle[2].
Dans le cadre de la formation tout au long de la vie, mission de l’Éducation nationale, la formation continue s’inscrit dans le continuum de la formation initiale. Elle doit permettre, pour les salariés, les demandeurs d’emploi, les jeunes sortis du système éducatif, l’acquisition des qualifications et diplômes, non acquis en formation initiale. Elle assure des formations allant du socle commun à la licence professionnelle en passant par des formations d’adaptation au poste de travail. Elle propose également des formations spécifiques telles que l’accompagnement dans et vers l’emploi, les bilans (d’orientation, de compétences, mi carrière), le tutorat, le conseil, l’accompagnement à la VAE, la définition et la validation de projet professionnel[3].
Les Greta assurent la mission de service public d’éducation des adultes. Ils constituent à ce titre un dispositif indispensable de la cohésion sociale et font partie intégrante de l’Éducation nationale. Les Greta disposent des structures, des moyens et des statuts leur permettant de remplir leur mission de service public : assurer grâce au maillage territorial une formation continue de proximité et tout au long de la vie.
Figure 1 : L’organisation territoriale d’un GRETA et ses acteurs
La forme grise représente un territoire, un secteur géographique, le plus souvent correspondant à une ou plusieurs zones d’emploi[4]. Ces zones hébergent un certain nombre d’entreprises, d’un même secteur ou non. Autrefois chaque zone d’emploi disposait le plus souvent d’un GRETA ; aujourd’hui, pour des raisons de réalités économiques (nombre d’entreprises, effectifs, spécialisations…), le nombre de GRETA diminuent progressivement, même s’il subsiste des antennes au sein de chaque territoire (les fonctions RH et administratives sont centralisées).
Ce territoire intègre plusieurs établissements scolaires publics (collèges et lycées), qui en se fédérant constituent le GRoupement d’ETAblissements (GRETA), et réunit les ressources humaines (enseignants, personnel technique) et les plateaux techniques (ateliers, salles spécialisées, laboratoires…) au profit de la formation continue. Les GRETA sont animés localement par des Conseillers en Formation Continue (CFC) et par une équipe de permanents (administratifs, formateurs, techniciens).
Le GRETA est piloté par un président, élu par ses pairs (les proviseurs et principaux des établissements adhérents). Il préside un conseil d’administration où se décide les orientations et développement du GRETA. Le siège du GRETA est le plus souvent hébergé dans l’un des établissements adhérents ; comme la structure n’a pas de personnalité morale, c’est son dirigeant qui est nommé ordonnateur. Dans de nombreux cas, président et ordonnateur ne font qu’un (le personnel de direction qui préside est celui qui héberge le siège social).
Le GRETA propose une offre de formation sur son territoire et pour ses acteurs (salariés, demandeurs d’emploi, individus), mais il est en concurrence par d’autres organisations implantées localement, mais aussi extérieures au territoire. Cette dernière concurrence est d’autant plus menaçante que la modalité e-learning s’affranchit (le plus souvent) de contraintes de proximité. Le GRETA, comme tous les autres organismes de formation continue, s’inscrit donc dans un marché fortement concurrentiel ; son maintien dépend de l’originalité de son offre, de la qualité de ses prestations, de sa réactivité, de sa capacité à proposer une réponse formation attendue.
Enfin, le réseau des GRETA dans l’Académie est sous la responsabilité de son Recteur, qui s’appuie sur son conseiller DAFPIC (Délégué Académique à la Formation Professionnelle Initiale et Continue) ou DAFCO (Délégué Académique à la Formation Continue). Ils veillent au respect de la politique académique et nationale de l’éducation nationale en matière de formation continue.
Mobiliser l’Éducation Nationale
C’est Olivier Guichard, alors ministre de l’Éducation nationale de 1969 à 1972, sous le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas, qui trace l’action d’orientation et de formation des adultes en exigeant une coopération active de l’ensemble du service public d’éducation ; il exprime alors un choix clair : pas d’Éducation nationale bis. Il annonce[5] :
« Tous les secteurs de l’Éducation nationale, ses écoles et universités, ses équipements techniques et ses personnels, toutes catégories comprises, sont appelés à participer à la formation continue. De même la fonction orientation doit être étendue aux adultes en besoin de réorientation et de conversion. Cette activité doit naturellement se conduire en coopération avec les partenaires sociaux, eux-mêmes demandeurs et appelés à coopérer avec le personnel éducatif sur les préoccupations des entreprises. »
GRETA et e-learning
Concernant l’engagement d’un organisme de formation, comme les GRETA, à investir le e-learning, il existe des incitations, des pressions et des opportunités. Par ailleurs, la longue histoire des GRETA – à l’échelle de la formation continue en France – montre qu’ils ont souvent participé – voire initié – des innovations pédagogiques en formation pour adulte :
- En s’appuyant sur les lois de 1971 – formation professionnelle continue (les salariés peuvent se former sur leur temps de travail et les entreprises doivent financer leurs formations), l’Éducation nationale, en décidant en 1974 de créer les Greta, met son potentiel éducatif au service d’un marché de la formation en pleine structuration. Pour y parvenir, les GRETA ont dû adapter la pédagogie aux publics, aux besoins et aux contraintes environnementales,
- La mission d’éducation permanente est inscrite en 1989 comme une des missions des établissements scolaires, au même titre que la formation initiale des jeunes (Article L122-5 du Code de l’éducation). Pour assurer le continuum pédagogique formation initiale/vie professionnelle/ formation continue, là encore les GRETA ont développé des modalités,
- Sous l’impulsion d’Olivier Guichard (alors ministre de l’Éducation nationale), les stages en entreprise (un an) pour les enseignants, suite au constat que le milieu enseignant ignorait la vie des entreprises, et que celles-ci critiquaient l’image de l’enseignement,
- L’invention et la mise en place des unités capitalisables, du contrôle continu, du référentiel de certification…, terrain d’expérimentation avant un transfert en formation initiale, les centres permanents, plus tard les entreprises d’entraînement pédagogique (EEP),
- Dans son rapport de 2006[6], l’inspection générale titre son premier chapitre : « 35 ans de formation continue, Le réseau des GRETA, une innovation historique majeure de l’éducation nationale »,
- Au sein du « Nouveau Contrat pour l’école », sous le Ministère de François Bayrou apparu dans la loi de programmation du 13 juillet 1995, parmi les 158 mesures, la numéro 87 fixait : « Les démarches innovantes dans la formation continue et les Greta font l’objet d’échanges et de réflexion dans le but d’en tirer des enseignements pour la formation initiale ».
- La participation ou le portage des APP (Ateliers de Pédagogie Personnalisée[7]), prémices de la formation ouverte, dès 1984,
- La mise en œuvre dans les années 90 de la robotique pédagogique dans de nombreux sites
- Le développement (avant son transfert, notamment en lycée professionnel ou technologique), de la pédagogie des compétences,
- Le recours aux diverses méthodes d’éducabilité cognitive, comme les ateliers de raisonnement logique (ARL), pour développer les capacités d’abstraction, de raisonnement, ou les programmes d’enrichissement instrumental (PEI de Reuven Feuerstein), dans le cadre de la requalification professionnelle, pour entraîner à des démarches cognitives d’analyse de l’environnement et de stratégies de résolution de problèmes,
- …
Depuis, beaucoup d’évolutions ont fortement impacté la nature et le format des formations dans les GRETA : compétences attendues sur le marché de l’emploi, politique européenne, validation des acquis de l’expérience, durée de formation contrainte, mixité des publics, financement de plus en plus serré…
Par cette histoire, pour ces raisons, le réseau des GRETA aurait dû investir largement le e-learning. D’ailleurs, très tôt, un consortium s’est constitué pour imaginer et faire réaliser une plate-forme de formation propriétaire en ligne (LMS[8] « e-greta ») ; cette dynamique devait participer à l’engagement, en normalisant les supports, en créant une communauté d’utilisateurs, de concepteurs.
Pour s’adapter aux évolutions technologiques, les formateurs bénéficient eux-mêmes d’une formation permanente dans les CAFOC. Ces formateurs sont recrutés en fonction des types de formations que le GRETA met en place à la demande de ses clients. Experts ou généralistes, ils sont :
- Soit des enseignants quand leur domaine de compétence correspond aux formations organisées
- Soit des formateurs issus des milieux professionnels quand la technicité l’exige (ces vacataires doivent alors avoir une qualification reconnue dans leurs disciplines ou domaines professionnels)
- Soit des personnels propres aux GRETA, lorsque le volume d’activité légitime leur emploi exclusif (poste gagé, contractuel).
Cette dernière catégorie s’est développée progressivement, pour devenir aujourd’hui majoritaire. Le fait de pouvoir davantage contrôler leurs parcours professionnels (et la formation utile à leur réussite), est également un facteur favorable à la gouvernance, et donc à l’impulsion d’un engagement collectif.
[1] Il y a en France 191 Greta, au moins un par département. Il existe en tout plus de 4 750 lieux où peuvent se dérouler les prestations présentielles (antennes).
[2] Source : article L. 6351-1 du code du travail.
[3] Source : Mémorandum pour une loi d’orientation et de programmation – SGEN CFDT 2012.
[4] Une zone d’emploi est un espace géographique à l’intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent, et dans lequel les établissements peuvent trouver l’essentiel de la main d’œuvre nécessaire pour occuper les emplois offerts (définition INSEE).
[5] Source : la formation continue, utopie en 1972, urgence en 2012 – Raymond Vatier – 2001, éditions EMS.
[6] La situation des GRETA – Rapport à monsieur le ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche – Rapport n° 2006-030 – juin 2006.
[7] Les APP forment un réseau permettant à des adultes de se former selon une démarche dite d’autoformation accompagnée. L’APP est un label pédagogique porté par des organismes de formation de natures diverses qui mettent en œuvre le même cahier des charges. « Un APP se caractérise par son approche pédagogique originale : formation personnalisée, sur mesure, dans les domaines de la culture générale et de la culture technologique de base, dont chaque personne négocie le contenu, la durée, le rythme, le tout formalisé dans un contrat pédagogique » – LES ATELIERS DE PEDAGOGIE PERSONNALISEE ou l’autoformation accompagnée en actes – Philippe Carré, Michel Tetard (2003) – Savoir et formation – EDUCATION FORMATION.
[8] Learning Management System.
le 17/11/17