Engagement des apprenants en formation



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  • L’engagement des apprenants en formation : volontaires ou contraints ?

    Avant de s’attacher à nos publics cibles (les adultes), rappelons quelques postulats sociocognitifs[1] quant aux aptitudes des apprenants (ou futurs apprenants) :

    • La capacité de se représenter et d’interpréter leur environnement grâce à des systèmes symboliques comme les langages parlé et écrit.
      • Dans le cas de l’e-learning, le langage informatique (ou tout au moins la maîtrise de l’interface, de ses symboles…) vient s’ajouter au concept de base.
    • La capacité de se référer au passé et à anticiper le futur joue sur la dynamique motivationnelle. Pour les plus jeunes, cela peut passer par la définition du projet professionnel, pour les acteurs déjà en situation active, par un projet de reconversion.
      • Il est important que les expériences d’e-learning vécues par chacun soient positives
    • La capacité d’observer les autres et d’en tirer des conclusions pour soi-même. Il est possible d’apprendre en regardant les autres effectuer une tâche sans avoir à l’accomplir soi-même. L’observation est donc un acte actif et peut motiver l’apprenant à s’engager dans des activités qu’il appréhende. C’est un élément important dans l’apprentissage par les pairs.
      • En e-learning, les situations de strict isolement empêchent sans doute cette capacité (à moins d’accéder à une vidéothèque ?).
    • La capacité de s’autoréguler, c’est-à-dire de contrôler et de modifier éventuellement ses comportements selon l’évaluation que l’on fait de la situation dans laquelle on se trouve. Cette notion est définie comme la possibilité de mobiliser la motivation, les ressources cognitives et les actions nécessaires afin de contrôler les événements qui apparaissent dans leurs vies

    En formation professionnelle continue, l’apprenant est (parfois) contraint de suivre une formation. Imposée par un employeur (« tu dois te mettre à l’anglais, parce que nous nous ouvrons à l’export… »), une réglementation (« tu dois obtenir ton CACES® pour pouvoir conduire le chariot élévateur… ») ou une injonction sociale (« tu dois te reclasser, changer de fonction, de métier… »), il doit subir la formation, et en tirer profit. Dans certains cas, une formation est obligatoire [2] quand elle est contrainte par un texte qui impose sa réalisation à l’employeur (formations hygiène et sécurité, par exemple). L’enquête CEGOS sur la formation professionnelle [3] pointe en ce sens le malentendu sur les motifs d’engagement en formation, entre les entreprises et leurs salariés. À la question « quelles sont vos principales motivations [4] pour suivre une formation », les réponses des salariés et des responsables des ressources humaines diffèrent sensiblement :

    Figure 84 – Les résultats à la question « vos principales motivations pour suivre une formation »

     

    Pour les salariés, les trois premières motivations à se former sont donc [5] :

    1. La possibilité d’obtenir une promotion
    2. L’augmentation des revenus
    3. L’épanouissement personnel et professionnel

    Alors, que, vus par les DRH, les premières motivations se classent comme suit :

    1. L’épanouissement personnel et professionnel
    2. Ex aequo Mieux accomplir le travail
    3. (Loin derrière) Améliorer l’employabilité pour mobilité interne
    4. L’augmentation des revenus

    Ces résultats sont tempérés par l’enquête, au regard de l’appartenance à une catégorie socio-professionnelle (employés et ouvriers manifestent le niveau de motivation le plus élevé pour « m’épanouir sur le plan personnel et professionnel », « mieux accomplir mon travail », « augmenter mes revenus » et « obtenir un diplôme »). Enfin, les résultats diffèrent également si les interviewés ont suivi ou non une formation au cours des trois dernières années.

    L’engagement en formation est « à la fois l’acte d’entrée et l’implication du sujet dans le processus d’apprentissage » (Bourgeois [6], 2009). Lorsque l’individu s’engage en formation, il prend (parfois) la décision, seul, de s’engager, il fait des choix, et parfois renonce à d’autres projets. En effet, comme l’écrit Bourgeois (1998 [7]) : « l’engagement ou l’entrée en formation est le processus qui conduit l’adulte, à un moment donné de sa vie, à prendre la décision d’entamer telle ou telle formation, c’est-à-dire, le plus souvent, à renoncer à d’autres options qui s’offrent à lui ».

    
    

    [1] Bandura, cité par Rolland Viau (2005) – La motivation en milieu scolaire. Bruxelles : De Boeck Université

    [2] Si les formations obligatoires ne semblent pas relever directement du caractère pérenne de la formation continue, certaines d’entre elles participent à la qualification du travailleur, indépendamment de son lieu de travail, l’inscrivant ainsi dans une dynamique de construction identitaire professionnelle (source : CEREQ – Bulletin de Recherches Formation/Emploi – n°356 – 2016)

    [3] Enquête CEGOS® 2012 sur la formation professionnelle révèle un certains malentendus entre les DRH/ RF (600 personnes interrogés sur 6 pays d’Europe) et les salariés (2800 personnes interrogées sur ces mêmes pays). La dernière enquête (2017) est consultable sur https://www.cegos.fr/Documents/cegos-chiffres-cles-enquete-formation-2017.pdf

    [4] Ensemble des facteurs dynamiques qui orientent l’action d’un individu vers un but donné, qui déterminent sa conduite et provoquent chez lui un comportement donné ou modifient le schéma de son comportement présent ». Source: centre national des ressources textuelles et lexicales – http://www.cnrtl.fr/definition/Motivation

    [5] Source : http://www.formation-professionnelle.fr/2012/05/14/salaries-quelles-motivations-pour-la-formation/miroir-france/.

    [6] Motivation et formation des adultes. In Ph. Carré & F. Fenouillet (Ed.), Traité de psychologie de la motivation. Paris : Dunod.

    [7] Apprentissage, motivation et engagement en formation. Éducation permanente, 136.

     


    le 17/11/17


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